Mardi 19 Janvier 2010
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FAITS DIVERS. Hier matin, le caporal-chef Sébastien Couturier, 33 ans, est décédé à l'intérieur des locaux embrasés
Un pompier mort au feu à La Rochelle
L'usine de conditionnement de crevettes a été entièrement détruite. Sébastien Couturier (en médaillon) y a trouvé la mort, en combattant les flammes.( Photos Dominique Jullian et DR)
L'usine de conditionnement de crevettes a été entièrement détruite. Sébastien Couturier (en médaillon) y a trouvé la mort, en combattant les flammes.( Photos Dominique Jullian et DR)
Vers 3 h 30, hier, sur le pôle Agrocéan de La Rochelle, l'explosion survenue au sein de DEM Atlantique a fauché la vie du caporal-chef Sébastien Couturier. 33 ans, père de deux enfants de 6 et 8 ans, il devait fêter ce même jour son anniversaire. Affecté depuis le début de l'année au centre de secours principal de Mireuil (La Rochelle), ce sapeur-pompier avait travaillé pendant dix années à la caserne de Rochefort et vivait avec sa famille à Tonnay-Charente.
Visage fermé et coeur serré par la disparition de ce collègue, les sapeurs-pompiers poursuivaient, alors que le jour se levait, leur mission auprès de la carcasse fumante de l'entreprise DEM Atlantique. Spécialisée dans la cuisson et le conditionnement de crevettes congelées (en provenance d'Amérique du Sud et d'Asie) à destination de la grande distribution, cette société est implantée depuis 1991 sur cette zone industrielle de Chef-de-Baie, non loin du port de pêche rochelais. Une extension de l'entreprise était en cours.
Un salarié appelle les secours
La chronologie de cette tragique nuit établit que Sébastien Couturier a été l'un des premiers pompiers à entrer dans les locaux de DEM Atlantique. Le 18 avait reçu un appel peu avant 3 heures.
« C'est Francis qui a appelé les pompiers », explique Marwen. L'intérimaire de 27 ans, employé depuis huit mois en qualité de cuiseur dans cette société qui compte 30 personnes, poursuit : « Nous n'étions que neuf à embaucher à 2 h 45. Une heure avant, deux collègues, Luc et Yohann, ont pris leur poste afin de mettre en route les deux chaînes de production. » Alors que ces deux ouvriers n'ont senti aucune odeur suspecte, Marwen, dont le poste de travail est situé à l'entrée de l'entreprise, témoignait : « J'ai été gêné par une odeur bizarre, du cramé qui faisait mal à la gorge. » L'intérimaire se trouvait alors au sous-sol de la société, non loin d'un trou par où descendent les emballages plastiques des boîtes de polystyrène entreposées au premier étage. « En regardant par le trou, j'ai vu la fumée et les flammes. Je suis sorti pour respirer et j'ai donné l'alerte. » Le feu a pris dans le stock des boîtes inflammables et dégageait une importante fumée noire.
Dans la rue, choquée par la mort du pompier et interloquée par la destruction de son lieu de travail, Christiane, une autre salariée de DEM Atlantique, confirmait : « J'étais encore dans les vestiaires lorsque Marwen nous a prévenus. Il nous a sauvés. Nous avons tout de suite évacué l'usine. » Quittant les lieux, un salarié coupait le disjoncteur qui neutralise l'alimentation en gaz du système de cuisson.
UN « FLASH OVER» « Lorsque les pompiers arrivent, expliquait hier matin le colonel Éric Peuch, directeur départemental du Service départemental de secours et d'incendie, le feu est alors confiné au centre de l'entreprise de 1 000 mètres carrés. Il est visible. C'est un "flash over", un embrassement de gaz à combustion qui provoque l'explosion. À partir de ce moment, il y a de très fortes températures et un embrassement généralisé de l'usine. Le caporal-chef Sébastien Couturier et un autre pompier, équipés du matériel respiratoire, sont alors au premier étage. » Ce binôme, muni d'une lance, est en attaque du feu. « Le collègue du caporal-chef s'est sauvé par l'escalier extérieur. Il a été brûlé au visage et hospitalisé. Dès que Sébastien Couturier est constaté manquant, un dispositif de recherche est mis en place avec un maître-chien et une caméra thermique. » Retrouver le pompier est une priorité, au même titre que la lutte contre l'incendie.
« Le corps sans vie a été découvert par l'équipe d'extinction trois quarts d'heure après. Il était allongé sur le ventre. Des tôles lui recouvraient le corps », lâche avec émotion le colonel Éric Peuch. Les circonstances exactes de son décès ne sont pas encore déterminées. Une autopsie a été ordonnée.
L'incendie, qui a complètement ravagé l'usine, sera circonscrit vers 7 heures. Au plus fort de l'intervention, 60 sapeurs-pompiers de La Rochelle, Rochefort et de l'Île de Ré étaient sur le site (1) ; six lances mises en action. Peu avant 9 heures, alors que les fumées se dégageaient encore de ce qui fut DEM Atlantique, Xavier Gargasi, expert en incendie désigné dans le cadre de l'enquête dont la police à la charge, entrait dans les décombres.
(1) Le préfet Henri Masse et le procureur de la République Guy Étienne se sont rendus sur place.
Auteur : ÉRIC CHAUVEAU
e.chauveau@sudouest.com
